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 Pandora Daumier


rising from ashes

Pandora Daumier

Pandora Daumier

Moire Résistante




Messages : 2473
Localisation : Dans la forêt
Humeur : Quand nous sommes-nous perdus ?

Pandora Daumier Vide
MessageSujet: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeDim 02 Aoû 2015, 23:10

Nom: Pandora

Prénom: Daumier

Rang : Résistante

Age : 33 ans

Age où vous êtes devenu Moire : 5 ans

Biographie (minimum 20 lignes) :

Un courant d’air s’infiltre dans la pièce en faisant s’onduler le rideau gris. Blanc. Il le fut un jour, s’enroulant autour d’un paysan, la main crevassée et cornée, les doigts courts et forts replié sur l’ourlet du rebord. Mais c’était il y a longtemps. Aujourd’hui, une horde d’hommes et de femmes au regard hagard on recyclé les draps, les montures de lits, matelas et mobiliers encore stables pour aménager des chambres relativement intimes. Un corps de ferme désaffecté, de toutes petites maisons aux murs rongés par l’humidité et l’érosion des innombrables végétaux  venus reconquérir les témoins d’une activité humaine lointaine, c’est là tout ce qui restait de la Résistance. Chacun s’organisait, reconverti tantôt en ouvriers du bâtiment, tantôt en agriculteurs, ou bien infiltré à Muddle City. Tout pour maintenir un ordre primitif autour d’un même instinct de survie.

L’onde de fraicheur balaie un amoncellement de poussière épars sur le sol, et roule jusqu’au fond de la pièce, atteignant la joue ruisselante d’une femme endormie. Elle tique, se retourne et ouvre les yeux. Elle les pose immédiatement sur la place vide à côté d’elle. S’il y avait eu un espoir dans ses billes bleutées, il s’en fut aussitôt constatée sa solitude. Elle reste ainsi un moment, plongée en élucubrations, rendant son ovale figée dans une expression soucieuse. Il fait chaud, la nuit a encore été mouvementée, le sommeil tarde toujours à venir. Sous la toiture verdie des combles, le soleil frappe de toute la force de ses rayons et brûle l’air de l’espace. Etouffant. Elle doit être encore la dernière à se lever. Elle ne sortira pas tout de suite, elle tarde toujours à se montrer, préférant même épier derrière les coins de mur avant de traverser le dédale de pièces et de filer en douce dans la nature. Elle ne revient que dans l’après-midi. Elle ne souhaite pas que l’on sache qu’elle dort mal, ou trop. C’est un malaise qui ne la quitte pas de la journée quand elle se fait surprendre à son réveil, groggy, la tête gonflée, et le regard sur elle des autres déjà affairés. Elle relève son buste et pousse le drap.  Sa nuque la tire. Elle frotte ses yeux gonflés et se masse les pommettes. Elle sent le relief de ses cernes sous ses doigts moites. Inspiration.

Encore la même rengaine. Les matins se ressemblent et se mélangent dans une même impression de monotonie.


-----


Vide. Allez de l’avant, ne pas se laisser couler, envahir. Si je me laisse tomber, je n’aurai plus de raison de continuer. Je n’y tiens pas. Je crois que j’ai bien trop d’orgueil pour penser que ma vie n’a pas de sens.

D’où me vient-elle d’ailleurs ? Cette impression grotesque que je suis supérieure aux autres ? Que ma compréhension des choses atteint des niveaux bien plus élevés que la masse populaire. L’humain surtout, celui que j’ai appris à diriger. C’est aberrant quand on y pense. Parce que somme toute, je n’ai rien vécu de plus, pas d’aptitudes particulières justifiant de telles prétentions personnelles.

Je souffle et soulève mes cheveux pour aérer ma nuque collante. Puis je me rappelle la veille au soir, atteinte par une énième crise de mésestime à mon endroit, de solitude. Je me sens lasse. Cela va bientôt faire sept ans que Nefrit n’est pas revenu, que je l’attends, que j’en rêve. Tout le monde attend de lui. Je sais qu’il est en vie. Lui, esseulé, reste obstinément dans l’impression désarmante de son échec. La Résistance a coulé, et avec elle sa foi en la liberté. Sa foi en lui. La culpabilité le ronge alors qu’il pense aux nombreux membres de sa fraternité ayant eu la confiance aveugle de lui confier leur vie. Je sais ce qu’il pense. J’aurai voulu qu’il me laisse la chance de lui en parler. J’avais depuis longtemps perdu de mon autorité sur les affres de ses sentiments auto-dirigés. Il faut croire que ma verve s’en est allée aussi. Ou peut-être que je ne me sentais plus en droit de le faire. J’aurai tellement de choses à lui dire aujourd’hui. J’ai tellement changé. Mais s’il n’est pas revenu pour moi, c’est que je dois plus avoir autant d’importance pour lui qu’avant. Il y a dix ans, j’étais Nyx, inquisitrice de Muddle Island. Cela fait tellement longtemps que je doute d’avoir un jour pu occuper cette place dorée. Je me souviens pourtant. Du sentiment allègre, triomphant, qui rythmait chacune de mes journées. L’avenir m’appartenait, à moi qui me levais tôt. La politique était un jeu logique auquel je me pliais tantôt avec acharnement, totalement absorbée par la résolution radicale d’un problème de société, tantôt avec une légèreté insultante, jetant mes directions à la volée, mes pensées concrètes allant plutôt à des loisirs divers et variés. Eva et Aurora. Des amitiés fragiles, je le sais à présent. Les évènements cataclysmiques avaient révélé la vraie nature de nos relations, et le lien ténu s’était pour Eva seule transformé en affection forte. La mort d’Aurora nous causa beaucoup de peine. Mais elle était surtout pour moi la preuve de notre fragilité à tous. Je vivais dans la frayeur qu’il puisse m’arriver la même chose, même si je n’en montrais rien.

Je me redresse soudain. Le bois craque, on monte les escaliers, le pas est lourd et décidé. Je me fais silencieuse en attendant qu’il reparte. Mais mon sang se glace en imaginant que l’homme puisse être lui. Il apparaitrait, poussant le rideau gris, une barbe hirsute dégoulinant de son menton et noyant son visage entre les broussailles. Il se serait tenu devant moi, les yeux durs, mais, imperceptiblement heureux et désolé. Je revois la scène encore et encore, et la décortique, interdite. Et la colère sourde en moi. Comment ose-t-il faire montre d’autant d’indifférence ? On ne me traite pas comme ça, moi.

Je suis admirable.

Colère insidieuse se mue en tristesse. Ce vide encore. Il s’empare de moi et m’étreint, me laissant morose et inapte, encore, au moindre effort pour exister. Non, je ne suis rien d‘autre qu’une femme qui a perdu de son éclat pour lui. Je ne suis plus cette Moire splendide, impressionnante et imbécile dans ses idées d’ascendance sur l’espèce humaine à qui il se devait d’ouvrir les yeux. Changer quelqu’un offre un rôle suprême auquel on s’attache. J’étais son obstination. Nefrit a toujours eu cette propension à l’héroïsme. Un héro a besoin d’une mission excitante où il se sent utile. Je baisse les yeux sur mes genoux en faisant encore une fois ce constat. Je me préfère pourtant à celle que j’avais été. Je me sens entièrement moi-même. Quoi ? Aimait-il vraiment les paillettes et le pouvoir ? Ne suis-je pas plus combative, plus vraie ? Je sais que je me trompe. Il ne s’agit pas de ça. Il s’agit de son sentiment personnel. Comme la nature humaine est prévisible.

Je repense au chemin parcouru, à l’enfance qui me prédestinait aux joies glorieuses de la régence. Douce enfance, jugée sous le ciel de mon orgueil éclairé. J’ai grandi avec une cuillère dorée dans la bouche. Adoptée par une famille à la richesse écœurante, dont le père, Moire économiquement influant, avait préféré renier la chair de sa chair, et offrir sa paternelle reconnaissance à une orpheline perdue, sous prétexte que le petit n’avait pas muté. Ce père indigne qui réservait à sa fille un avenir terrible, allant jusqu’à la renommer, Pandora, présage d’une force persécutrice. J’exècre ce prénom. L’entendre est comme une punition pour me rappeler comment l’enfant pure était devenue le produit des croyances insanes d’un homme imbu de pouvoir.

Pauvre Antoine. Mon Dieu…
Je n’y avais jamais sérieusement songé. Qu’est-il devenu aujourd’hui ? Plonger dans ces souvenirs me glace le sang. Des scènes abjectes refont surface. Antoine battu, injurié, humilié devant moi. Et mon sentiment ? Bien à dix ans à peine je regardais la souffrance d’un fils avec la suffisance d’une idiote qui pense sincèrement être privilégiée par la génétique. Qui pense être dans son droit le plus juste, le plus « naturel ».
- C’est naturel, Pandora, ma princesse, certains sont nés et choisis par les lois de l’évolution pour dominer, tout comme Néandertal s’est éteint au profit d’Homo Sapiens. Ils sont les électrons libres d’un atome mourant, des déchets. Ils sont condamnés et n’ont d’autres utilités que de nous servir. Nous sommes la race du futur.
- Oui Papa, je sais mon Papa.
A ces mots se glissait sur son visage durci un sourire fier qui emballait mon cœur de petite fille de joie et d’amour. Quelle blague cruelle. Je n’étais pas aimée, j’avais été choisie, soigneusement. Bon score au test de QI de Wechsler, aptitudes Moire clairement démarquées, tout pour reprendre le flambeau Daumier. Et puis, brune, les lèvres pleines et de grands yeux bleus, pour ressembler à ma mère adoptive.

Ma mère, pauvre femme brisée. Je la comprends à présent. Cet être délicat, secret, tourmenté avait vécu sa mutation comme la perte effroyable de la vie familiale qu’elle adorait. Antoine était sa raison de vivre, et elle me haïssait, elle débordait d’amour pour lui, mais mon père prenait toutes les précautions pour qu’elle ne puisse jamais le lui dire. Alors, elle ne faisait que dépérir. Voilà pourquoi les tentatives de suicide, les scènes violentes où mon père hurlait dans toute la maison, l’exhortant à se sentir honorée et fière d’être Moire. La vérité c’était qu’elle se haïssait et que cela ne changeait rien à l’amour d’une mère.

Si seulement j’avais eu la présence d’esprit à cette époque de m’insurger contre l’injustice de ce drame familiale orchestré par mon père. Mais j’étais trop heureuse d’être la seule à mériter son précieux assentiment. Nous formions le binôme parfait, avec mon Papa. Mon papa qui s’attachait chaque jour à améliorer ces naturelles prédispositions à la domination. Comment aurai-je pu nourrir mon esprit d’autres valeurs dans un tel climat familial ?

J’aurai pu vivre ainsi toute ma vie, influencée par le comportement brutal de mon père et chroniquement insatisfaite de toutes mes relations amoureuses. Le temps aurait pu recouvrir de poussière mes sentiments les plus honorables et transformer mon détachement affectif en rage sourde. De femme incomplète, je serais indubitablement devenue cette vieille femme, riche et acariâtre, refusant la compagnie des autres, claquemurée dans l’amère solitude sénile qui persuade que rien ni personne n’aurait pu rendre cette vie plus agréable. Nos choix tracent d’avance le chemin de nos vies, si différentes et si semblables à la fois. Nous obéissons tous aux mêmes règles. Certains ont de la chance. Il suffit d’une personne pour offrir de nouvelles perspectives d’avenir et changer irrémédiablement le cours d’une vie. Une personne pour démontrer que la voie de la déraison ne peut apporter qu’une vie malheureuse. Le hasard avait voulu poser sur le mien l’un des hommes les plus combatifs qu’il m’ait été donné de rencontrer. Nefrit. Un esclave, devenu affranchi, puis aimé de tout l’amour d’une femme. Mon voyage initiatique fut semé d’embuches et de retours en arrière. La patience de Nefrit, mise à rude épreuve. Car l’acceptation de me voir changer malgré moi, plus qu’une chose aisée, fut une véritable torture de l’esprit. Je luttais aussi bien contre mes principes que contre la force de mes sentiments. La souffrance que je lui causais à ma dernière incartade fit voler en éclat mes dernières résistances.

Je me sentis libre d’exister pour moi. De me redécouvrir. J’avais le pouvoir de changer les choses, j’étais confiante. J’avais déjà aidé Muddle à adopter une politique autoritaire donnant le monopole aux Moires, je pouvais progressivement le leur retirer, avec le concours d’Eva et d’Aurora que nous aurions finit par convaincre. Bien sur j’avais conscience de la nature démesurée du plan, bien sur les tensions entre Moires et Humains étaient plus que jamais palpables. Mais nous étions Muddle Island. Il n’était plus question de faire maintenir des règles si je les jugeais moi-même absurdes.

Je devais toutefois me heurter à mon insuffisance, au conservatisme ancré dans les consciences Moires, peu enclins à renoncer à leur privilèges. Et les évènements se déroulèrent bien trop vite pour en être les auteures. Nous n’étions que les rouages d’une mécanique qui nous dépassait, et lorsque certains tentent de ralentir l’allure, on les remplace, ni plus ni moins. J’étais jeune et inexpérimentée, je revois aujourd’hui la longue liste de mes erreurs et les condamne en secret. Eva humaine, moi affichant ouvertement ma relation avec Nefrit, certains Pro Moires plus téméraires eurent tôt fait d’organiser peu à peu le coup d’état qui nous éjecta purement du système.

Ce fut Eva, tout d’abord. Ils la destituèrent de sa liberté, devenant à son tour esclave d’un certain Adrian Luchtar. Comme si ça n’était pas suffisant les Pro-Moires exigèrent un autodafé. Malgré toutes mes protestations, le sort d’Eva ne devait plus être de mon ressort. Elle fut emprisonnée dans la tour de Muddle, forcée d’attendre le châtiment que lui réservait Julian Falcon. Ce fut en rentrant chez moi, alors que je cédai pour la première fois aux larmes, perdue dans le cauchemar éveillé de notre perdition, qu’il vint à moi, Adrian, avec le plus risqué et fou des plans de sauvetage. J’étais désespérée et éreintée, défaitiste, une faiblesse que le laissait insatisfait. La façon dont il me parlait eut tôt fait d’appeler la rage à s’exprimer. A dessein. C’est le visage tuméfié qu’il se présenta à la sécurité de Muddle Tower, me trainant et me poussant, exigeant réparation pour un tel affront. On m’enferma dans un bureau transformé en cellule pour l’occasion. Le souffle coupé par un dernier coup de vengeance d’Adrian, je tirai le tourne vis de sa cachette de fortune, inutile de préciser où, et entamai ma progression lente dans les conduits réduits d’aération. C’est de la même manière qu’elle repartit, atrocement affaiblie, rejoindre Adrian dans une autre pièce, alors que je retournai sagement à ma cellule. Le lendemain, l’on vint m’interroger sur la disparition d’Eva, pour laquelle, bien sur, je n’y détenais aucun rôle puisque j’étais honteusement détenue ici. Mon esclandre joué finit de me soutirer toute mes dernières énergies. Retrouver Eva saine et sauve chez moi fut une joie immense autant qu’un désespoir ténu. La voir chaque jour en rentrant chez moi était comme regarder l’égrenage lent mais certain de ma propre déchéance.

Il me restait pourtant de la hargne. Je m’opposais fermement à leur démagogie folle, à en perdre mon calme. Ils tentèrent par tous les moyens de me destituer de mon rôle, jusqu’à trouver la faille. Eva. Nefrit. Ce ne fut pas long. Ca n’était qu’une question de temps. Extradée. La milice était en marche. Je n’avais que quelques minutes pour conduire pied sur le plancher jusqu’à mon appartement et tirer Eva de là. Comment expliquer l’onde de panique ? La peur, la rage d’une injustice et le constat d’une impuissance consternante ? Je perdis tout ce auquel je m’étais attachée en quelques jours. Il faut de la présomption pour monter à la tête d’un pays, il en faut plus encore pour penser être intouchable. Pandora Daumier Nyx de Mudlle Island, du jour au lendemain, une Moire sans autre distinction, si ce n’est l’écho dégradé du nom, dans tous les esprits. Je dus faire face à la honte, lutter contre le découragement. J’avoue n’avoir rien décidé des épisodes suivants. Nous quittâmes en hâte mon appartement, suppléées par Nefrit, pour rejoindre la ville qu’il avait voulu me cacher par sécurité. Je devenais malgré moi Résistante. Ce soir là, je n’avais même plus de larmes pour pleurer, je ne réalisais pas encore que ce dernier déplacement sur le damier de l’échiquier ne permettait aucun retour possible.
Désorientée, sans le moindre repaire, je me sentis perdre pied et être de nouveau forcée de m’adapter. J’étais terriblement seule. En parler à l’homme qui partageait ma vie et dirigeait avec une poignée d’hommes et de femmes la Résistance était inapproprié. Comment expliquer que le pouvoir même qui l‘avait condamné à la servitude me manquait atrocement ? Que je ne savais plus quelle était ma place, et que tourner en rond me rendait folle ?

Liebe était froid et sombre. Ce fut bien malgré moi que j’admis quelle femme matérialiste j’étais. 200m², parquet en chêne massif, 4 chambres, une terrasse plongeante sur Muddle Island et la mer, piscine chauffée, matelas dur double épaisseur, dressing fourni des plus couteux vêtements… le confort faisait parti de ma vie. Les choses ont bien changé depuis. A la ferme, je me suis depuis  longtemps habituée à risquer d’exposer ma nudité pour me laver dans l’étang, à conserver les vêtements longtemps, les remettre plusieurs jours, ne rien détenir réellement si ce n’est que son propre corps. Je la préfère à Liebe. Je m’y sens plus libre. Déambuler dans les couloirs aux voutes rondes et humides des égouts me rendait un brin hypocondriaque. Je suffoquais. Le bruit, permanant, des échos intrusifs me lacéraient les tympans. L’humidité, omniprésente, déposait à chaque réveil sa moiteur pénétrante. Les pas… les pas des incessantes allées et venues tambourinaient jusque dans la poitrine. Liebe me faisait imploser. La moindre excuse était bonne pour remonter à la surface. Dans le chaos débridé de mes pensées contrites entre ces murs, ma seule option était d’utiliser les seules compétences que je me reconnaissais encore. Donner des ordres. Partir en excursion récupérer des denrées pour Liebe, le plus souvent. Partir seule à l’insu de tous, cachée, me détournant même de la ville qui m’avait trahie pour aller courir et respirer l’air frais des anciennes Vosges. C’est là même que je rencontrais Wayne Pennant. Un tueur à gage payé très certainement par les inquisiteurs pour me faire capturer morte ou vive. Un contrat que lui-même ne tint finalement pas à honorer passés les avances séductrices de nos premiers échanges. Il préféra me confronter à un terrible marché.  Ma liberté contre la chance de pouvoir arpenter Muddle, sous sa tutelle. La chance de pouvoir tenir informer la Résistance et de détenir un rôle, enfin. La réflexion ne fut pas longue. Je me rendis compte que malgré toutes difficultés personnelles qu’avaient engendrées les derniers évènements, je n’aurai pour rien au monde accepté de retours en arrière. J’aimais non pas la femme que j’étais devenue, mais j’étais attachée aux valeurs qui étaient miennes, là où se trouvait ma vérité.  Au culot, je lui demandais plutôt et sans autres échanges de m’apprendre à me battre. J’avais l’impression que de savoir me défendre allait améliorer ma confiance en moi, et surtout, me sentir plus utile, plus crédible aux yeux de Nefrit. Pourtant je ne lui parlais jamais de Wayne et de mes séances d’entrainement. Ce dernier opta pour un mélange de Krav-Maga et d’Aïkido, jugeant qu’il n’était seulement nécessaire pour moi de retourner les attaques à mon avantage. En secret, je venais le rejoindre autour de ce même lac. Il m’apprit à faire attention à mon environnement, à être plus vigilante aux bruits, à repérer aussi des traces en pleine nature. Peu à peu, j’entrai dans un état d’esprit plus paisible. Les exercices étaient de plus en plus difficiles et réalistes. Je me sentais revivre, c’en devint même addictif, j’en demandais toujours plus. Couteaux, pistolet, il n’hésitait plus à tirer et donner des coups mortels pour affuter mes réflexes et me préparer aux conditions réelles. Mais Nefrit devait mettre fin à mes sorties solitaires et organisées, à grand coup de disputes fatigantes, lorsqu’une rencontre avec Sien Sovv faillit de me faire capturer. Il ne réalisait pas qu’agir constituait mon dernier rempart avant l’effondrement. Encore une fois je me retrouvais seule face à moi-même, à réfléchir sans cesse sur ma position.

Liebe ne devait pas durer. Souvent je me demandais jusqu’où pouvait aller la Résistance, assurément je ne croyais pas en leur victoire. Il suffisait d’un seul affront insultant leur pouvoir pour que les Pro-Moires déploient leurs réelles forces armées et nous mènent tous à notre perte. La puissance militaire du gouvernement n’avait pas son égal. Lorsque nous sentîmes tous la terre trembler tout autour de nous, je sus que notre départ était inéluctable. Et curieusement, je l’attendais.

N’ayant de toute façon pas la permission de rejoindre les groupes Résistants armés pour me battre, je préparais les quelques femmes et leurs enfants réfugiés de Liebe à partir. Je ne parvins pas à convaincre tout le monde. Certaines avaient une telle fureur contre les Moires que mon passif desservit toutes mes paroles, d’autres avaient peur de quitter leur repaire et de lâcher leurs hommes. J’avais déniché un immeuble au Ghetto qui pourrait nous abriter le temps de trouver un endroit plus sécurisé et secret. Nous perdîmes beaucoup de vies au cours des ces cinq mois de combats. A chaque fois qu’un groupe partait, je restais dans la salle de communication afin de suivre en temps réel les assauts et décider de donner ou non le signal de notre fuite, aussi pour garder un œil sur la vie de Nefrit. Je n’étais cependant pas préparée à la stratégie d’Alistair.

Ce fut le 7 novembre 2053. Nous avions juste eut le temps d’entendre à la radio que la position de Liebe avait été découverte que nous entendions déjà ce bruit sourd et lointain, de plus en plus fort. Les deux techniciens se regardèrent indécis, et je leur hurlai de partir le plus vite possible en courant en direction opposée, bien décidée à sauver les femmes qui me faisaient confiance. Je beuglais à toutes celles et tout ceux que je croisais de sortir à l’Est et de ne rien emporter, je tirai et jetai les sacs, bagages des mains et montrai du doigt la sortie en continuant de courir. J’étais affolée, l’adrénaline se diffusait dans tous mes membres et me donnait encore plus de force. Je n’eus pas le temps d’atteindre le groupe, toujours réunit au nord de Liebe, juste au dessous de l’immeuble qui était sensé nous abriter. L’eau était déjà là. Je vis les flots dans toute leur menace rouler et courir jusqu’à moi, noyant tout sur son passage, je fis demi tour, la peur au ventre, la mort aux trousses.
Je pris dans mes bras le bébé d’une femme sur mon passage et elle courut plus vite encore. Nous atteignîmes tous trois l’échelle qui devait nous sauver, et l’eau nous grignota les pieds, créant un trou aspirant en se cognant puissamment contre la paroi. Nous n’eûmes pas le temps de nous reposer. Le sol se craquelait  et emportait sous lui les immeubles et les maisons. L’asphalte explosait de toute part, et par-dessus tout, les forces armées tiraient à vue. Plus le temps de réfléchir, j’aboyais comme une folle de courir à la forêt, de ne pas s’arrêter. Je rendis l’enfant à sa mère et courut aider toutes celles que je pouvais, cachées, tétanisées, paralysées.

J’arrivais à bout de mes prérogatives lorsque trois camions freinèrent à quelques centaines de mètres. Silence. Puis les portes s’ouvrirent en laissant s’échapper la marée de noir et de gris inhumaine. Comme un jeu de mécanique, ils se placèrent en double ligne et nous pointèrent de leurs fusils automatiques. Nous ne nous échapperions pas tous. C’était évident. Une rapide analyse du terrain m’enjoignit à hurler de courir ventre à terre, les décombres étaient nos alliés. Nous atteignîmes la forêt, nous emmêlant dans les arbres  protecteurs, nous éloignant des coups de feu tonitruants. La peur, le sentiment d’insécurité nous encouragèrent à poursuivre notre course longtemps. Les muscles se déployaient sans efforts. Le cerveau ne réfléchissait plus que pour activer les nerfs. Stop, stop. Elles supplièrent. Je me retournai enfin et ne vis que cinq femmes et trois enfants. Alertée par leur nombre, je leur sommai de rester ici et partis en espérant en trouver d’autres. « Préparez-vous à tirer, il y a quelqu’un » entendis-je en reconnaissant la voix de Raphaëlle, l’une des seules femmes qui m’avait fait entièrement confiance dès le début. Le groupe était en vie ! Je m’annonçais et elles sortirent toutes saines et sauves, heureuses de me voir. Elles n’avaient pas hésité une seule seconde en entendant l’eau et n’avaient pas jugé bon de rester dans l’immeuble où les murs tremblaient déjà. Sans autres choix, elles avaient rejoint la forêt à pas de loup, avant même que les forces armées ne viennent déchiqueter les derniers corps affolés. Elles avaient craint de ne plus jamais revoir quiconque.

Au bout de plusieurs jours, d’autres femmes et les survivants des attaques trouvèrent notre petit groupe encore à découvert et bien trop proche de Muddle City. A chaque fois, je cherchais Nefrit des yeux, et ravalais fièrement mes larmes en face des autres. Le soir seule, je me levai sans un bruit et partais pleurer toutes les larmes de mon corps, jusqu’à l’épuisement, puis retrouvais le camp la tête baissée, résignée. Nous marchâmes longuement, et nous arrêtâmes dans cet ancien corps de ferme.

Si j’avais gagné l’estime de certains Résistants, je n’étais pas de celles avec qui l’on trinque autour du feu en plaisantant. Il restait toujours une distance qui me retranchait dans ma solitude. J’ai peu d’amis. La situation est loin de me convenir mais je ne parviendrais de toute façon pas à être naturelle au milieu d’un groupe. Je m’intègre difficilement. Finalement, c’est moi qui me place moi-même dans ce système. Je ne participe à aucune activité commune. Je ne cuisine pas, ne cultive pas, ne chasse pas, ne construit pas. J’arpente parfois Muddle City et ramène d’autres réfugiés. Des humains, des Moires. C’est peut-être mon seul rôle. Et un autre bien moins connu. Même s’ils en parlent. C’est arrivé grâce à Dog.

Au cours d’une de mes excursions à Muddle City, je trouvais dans les décombres de l’ancien Ghetto un chiot maigre à faire crever les cœurs, sage et affectueux. Un dogue argentin tout blanc. Touchée par son petit museau humide me caressant le menton, sa faiblesse confiante, je l’emportai avec moi à la ferme. Il créa des émules auprès des enfants. Avec leur concours, nous soignâmes Dog, lui donnâmes à manger, des caresses, de l’amour. Même petit, Dog semblait me renifler et me trouver toujours. Lorsque je partais marcher dans la nature à l’insu de tout le monde, je ne tardais pas à l’entendre sillonner les herbes et les mousses, trottinant gaiement. Il me suivait partout. Et je m’amusais de le sentir à mes trousses, la queue ballante, excité à l’idée de renifler toutes ces odeurs. C’est grâce à lui que je me suis rapprochée des enfants. Les seuls à ne faire aucune distinction parmi les adultes. Jamais je n’aurai cru ça de moi. Mais ils me font rire, sont source de fraîcheur et de simplicité. Ils me parlent de leurs soucis, me demandent de leur faire la toupie, ou de faire voler des objets dans des éclats de rire et d’émerveillement. Lorsque je pars, ils  me demandent des livres et des jeux, je les connais tous et sais toujours quoi leur offrir. Ils sont l’intermède bienvenu à mes angoisses et à mon sentiment de ne pas appartenir au groupe. Ils ont fait naître en moi le curieux malaise de ne pas être une femme complète. J’y pense de plus en plus. Demain j’irai, me dis-je. J’irai voir ce qui se trame dans les bas-quartiers de Muddle City. Ursae Minoris.


Physique  :

C’est une belle femme, qui l’avait été encore plus autrefois. Les lourdes épreuves ont marqué et modifié son visage il fut un temps rieur. Elle a quitté les paillettes et la haute couture pour revêtir des jeans et des tee-shirts simples, souvent noirs ou blancs, des chaussures de montagnes et un vieux cuir usé auquel elle est attachée. La plupart du temps, elle vous regardera avec un sourire ténu, doux, et des yeux perçants. Elle cherche à savoir qui vous êtes. Mais si vous la surprenez lors de ses courantes rêveries, vous percerez à jour une femme plus soucieuse, la bouche fermée et l’œil tourmenté. Les nombreuses marches et excursions en pleine forêt auront solidifié ses jambes, galbé mollets et cuisses, et marqué sa peau de plusieurs cicatrices et blessures superficielles. Ses cheveux autrefois longs et bruns se sont éclaircis et raccourcis afin de passer incognito à Muddle Island. Mais son apparence est tellement différente aujourd’hui que personne ne semble jamais la reconnaitre. Et si quelqu’un venait à plisser les yeux, elle sait disparaitre rapidement.

Caractère :

Pandora ne déroge pas aux règles compliquées qui régissent le caractère humain. Si son enfance s’est déroulée sous le ciel de la richesse, de l’éducation rigoureuse, et de l’amour froid, ça n’en fait pas moins une femme humaine, soucieuse et protectrice. Audacieuse, elle préférera pourtant réfléchir à ses actes et paroles avant de les exécuter. Elle est obnubilée par une idée de vérité, de perfection, de justesse. Sensible aux petites et grandes choses de la vie, elle ne l’a pas toujours été, c’est sans doute ce pourquoi elle y attache aujourd’hui tant d’importance. Elle refuse d’avoir un jour l’impression d’avoir raté, ou bien même négligé certaines choses qui l’auront conduite à de moins beaux hospices. Si la réussite et le succès avaient été son plus grand leitmotiv, elle n’en garde aujourd’hui que le besoin d’être reconnue. Sans vraiment le comprendre, elle ne réussit pas vraiment à s’intégrer aux autres, si ce n’est dans un groupe où elle peut agir professionnellement, donner des directives ou des opinions qu’elle sait être justes. Les autres éveillent en elle un sentiment d’admiration lointaine, mais aussi de dédain. Rares sont les personnes avec qui elle se sent assez à l’aise pour plaisanter et rire sans réfléchir sans cesse à sa position. Ce n’est pourtant pas faute de le désirer. Sa vie manque parfois de légèreté. C’est avec les enfants qu’elle se sent le plus libre. C’est une solitaire invétérée qui rêve d’être davantage entourée, appréciant autant son caractère sauvage que le condamnant.

Autre  : Connait la forêt comme sa poche

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Dernière édition par Pandora Daumier le Jeu 13 Aoû 2015, 22:02, édité 4 fois
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Lyn'x

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Pandora Daumier Vide
MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeDim 02 Aoû 2015, 23:41

Han, c'est une fiche sublime! Love Ca valait le coup d'attendre!
Re-bienvenue Pando (je pense pas que tu aies un problème de mot de passe =p)
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Iris Sword

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Pandora Daumier Vide
MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeDim 02 Aoû 2015, 23:43

Ai je réellement besoin de le dire? D'officialiser la validation? Bon allé je le fais pour le sport! T'es validée bien sûr!

Et j'adorai déjà Pandora à l'époque et je l'aime encore plus maintenant, très touchante, très humaine, une personnalité attachante et rongée par les années, les problèmes, les vieux démons, je ne peux que l'apprécier!

(on fera des virées en forêt keupine? Love )

Et puis, j'aime bien son côté proche des enfants! Bref, j'aime tout! J'ai hâte de te lire maintenant! Et de voir cette petite Pando évoluer dans les débris de sa vie (amoureux de la poésie, bienvenue!)
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Angel Hawkins

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Pandora Daumier Vide
MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeLun 03 Aoû 2015, 00:05

Un régal de la première à la dernière ligne Yeux 

 Bon retour Pandora cheers
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Kyoran Gweria

Kyoran Gweria

Killer Babe




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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeLun 03 Aoû 2015, 08:03

Rah quel plaisir de la redécouvrir ! Je l'adorais déjà à l'époque comme Iris, et comme Iris, je la trouve encore plus intéressante maintenant, elle a pleins d'aspects supers à creuser, j'ai bien hâte de te voir la jouer !

Je te souhaite donc officiellement un bon retour Admins 2 Admins 2
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Pandora Daumier

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Moire Résistante




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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeLun 03 Aoû 2015, 13:59

Ooooh merci tous !  Run

Lyn'x, trop chou.
Iris, oh oui une ballade champêtre ^^
Angel, chaud au cœur ❤
'Ris, Kyo, je suis contente qu'elle vous plaise comme ça. C'était important pour moi de lui donner plus de corps et d'humanité :-)
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Eva Desta de Bianca

Eva Desta de Bianca





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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeMer 05 Aoû 2015, 10:51

Ta plume est toujours aussi belle et poétique. Que j'aime ce personnage...

Peut être que deux amies égarées se retrouveront au détour d'une rivière.
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Humeur : Quand nous sommes-nous perdus ?

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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeMer 05 Aoû 2015, 10:57

Au détour de la rivière ^^
Oui !

Merci Eva ! Run
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Aristide Lascaris

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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeMer 05 Aoû 2015, 12:26

Moi je suis pour le retour aux Nyx, j'aime donc bien cette fiche. cheers

Tu as toujours ta belle plume même si tu as troqué ta belle robe pour un t-shirt et changé de visage.
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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitimeMer 05 Aoû 2015, 13:35

Yeah !
Dance

Haha ! Merci beaucoup Aristide !
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MessageSujet: Re: Pandora Daumier   Pandora Daumier Icon_minitime

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